Mardi 5 janvier :  A Ce très cher, vieux et feu Ivan (Illich)

 De curé, il était devenu penseur écolo, était parti professer aux Amériques et avait succombé à un cancer qu’il avait laissé à sa place pendant une vingtaine d’année avant de le laisser finir son œuvre, sans même le secours de la médecine moderne...

 

 Son langage était difficile, parfois abscons et reposait sur une constatation : le développement de nos techniques, de nos industries, de nos institutions allait jusqu'à franchir un seuil critique …et au-delà, tout devenait contre-productif. Tout y passait ; Industrie et vie moderne, éducation et même médecine ...

Sa production était littéraire, philosophique, complexe et à contre-courant en cette fin de 20° siècle où l’on se devait de croire en un progrès illimité, avoir totale confiance, au risque de ne plus être tenu comme « progressiste » et ami de l’humanité …

 

L’homme m’avait convaincu avec quelques simples exemples, et, comme cycliste, j’avais apprécié son petit calcul de la vitesse « réelle » de nos moyens de transports. Il avait calculé le temps passé par l’américain « moyen » pour se procurer, entretenir et conduire l’automobile lui permettant les quelques milliers de kilomètres parcourus dans l’année. Le total des heures consacrées à son automobile, rapportées à cette distance annuelle déterminait ainsi la vitesse moyenne de ce moyen de transport, soit une douzaine de kilomètres / heure, et donc un peu moins que celle atteinte par les cyclistes de mon âge !!!

 

Le discours ne plut guère en ces toutes dernières années des trente glorieuses… On balaya vite l’argumentaire : les penseurs patentés ne manquaient pas. Ailleurs, comme chez nous, les élites formées étaient de « grands serviteurs » selon le cas de l’État, ou plus souvent de leur employeur : banquier, industriel ou pharmacien. Payés pour justifier les intérêts et décisions prises, ils recourraient essentiellement à des formules dialectiques, au mépris évident de la simple honnêteté intellectuelle.

Entre la complexité de l’un et les embrouillaminis des autres, ses théories furent bientôt oubliées et l’ouvrier moyen retourna travailler avec ardeur afin de se payer une nouvelle automobile.

 

Je gardais au fond d’une poche une version plus simple des idées du vieil homme. Après tout, les penseurs et philosophes, en usant de formules qui nous assomment, arrivent à nous faire toucher du doigt les simples et fortes vérités dont nous n'avions qu'une assez vague intuition.

 

Pour ce qui est de la Santé et de la Médecine, ses théories étaient difficiles, elles avaient été tournées, retournées et contestées au fil des années. Cependant, il en restait une simple et évidente constatation. Là aussi, le progrès, les techniques avaient dépassées le point critique et devenaient contre productives… et le plus grave était que l’on avait oublié l’acte fondamental, le soin, l’écoute, la base même de cet art.

 

Le(a) Covid m’y fait revenir …

Un protocole a remplacé la consultation, l'examen clinique, l’attention portée au patient, la connaissance de ce dernier… Demain, on vaccinera (ou tentera de le faire) la planète entière. Je le ferai peut-être : après tout, je ne risque sans doute pas plus à faire cela que sur les routes de France à vélo, que bouffer des produits alimentaires de supermarché, tous issus d'une agriculture industrialisée, ou simplement croire qu’à mon âge je suis encore autre chose qu'un vieillard cacochyme…

 

Bref, je me fous un peu de tout, surtout de la Médecine officielle, de son approche fondées sur des statistiques toutes également biaisées, et qui se prétend Science à défaut d’être restée un art, art merveilleux fait d'observations, d’intuitions et de fulgurances, toutes tournées vers le bien-être et la santé de l'autre.

Il reste à guetter et chercher, comme Diogène avec sa lanterne, ce qui nous reste dans ce monde de ce simple, basique et si humain acte de soin.